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Schéma relatif aux caractères typographiques, Jan Tschichold, Die Neue typographie. Ein handbuch fur zeitgemass schaffende, Verlag Des Bildungsverbandes Der Deutschen Buchdrucker, Berlin, 1928. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, trad. de l’allemand par Françoise et Philippe Buschinger, Éditions Entremonde, Genève, Paris, 2016 [1925], p. 109

Schéma relatif aux caractères typographiques, Jan Tschichold, Die Neue typographie. Ein handbuch fur zeitgemass schaffende, Verlag Des Bildungsverbandes Der Deutschen Buchdrucker, Berlin, 1928. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, trad. de l’allemand par Françoise et Philippe Buschinger, Éditions Entremonde, Genève, Paris, 2016 [1925], p. 109


 

On se rappelle que Jan Tschichold, quand il se résolut, à la fin de la seconde guerre mondiale, à abandonner les découvertes relatives de la « elementare Â» ou « neue typografie Â» des années 1920, accusa ces dernières de procéder du même esprit que les mouvements totalitaires qui menèrent, dans les années 1930, l’Europe à la guerre ainsi qu’à l’abîme de plusieurs meurtres d’échelle industrielle — et l’on doit peut-être intégrer à ce panorama désastreux des technologies de crimes de masse, non seulement la Shoah, non seulement le Porajmos, mais encore les faits de guerre, quels qu’ils soient depuis lors, incluant les bombes atomiques sur le Japon, le napalm sur le dit Vietnam, tous les gazages de Saddam Hussein, tous les drones tueurs ou toutes les « Tempêtes du Désert Â», c’est à dire toutes ces armes industrielles, mais aussi toute cette guerre économique qui les a remplacées en tant que forme obligée, presque cultuelle, en tous cas indépassable, du soi-disant « Ã©tat de paix Â».

« Les produits les plus modernes de notre ‹ culture â€º sont les armes de représailles [dans le texte original les bombes nazies V-Waffen] et la bombe atomique. Ils se préparent déjà à conditionner notre style de vie et, certainement, continueront de propager le progrès de manière irrémédiable. Â»
Jan Tschichold, 19461

« Tschichold était en tournée de conférences à Stuttgart et à Donaueschingen, lorsque, début mars 1933, des nazis en armes s’introduisirent dans sa maison et, sous prétexte de perquisition, y mirent tout sens dessus dessous. Sa femme fut mise en prison, mais n’y resta que quelques jours. Lui fut mis en détention préventive pour une durée indéterminée. Il apprit dans sa cellule qu’il était démis de ses fonctions [au service de la ville de Munich]. Tschichold se rendit compte que l’Allemagne se ruait à l’abîme et choisit de s’exiler. Le sort de son fils, âgé de quatre ans, n’était pas étranger à cette décision. Â»
Fernand Baudin – « Reminiscor Â»2

Jan Tschichold, Mozart, Symphony no 39 in E Flat, Penguin scores 16.3/6, 1949

Jan Tschichold, Mozart, Symphony no 39 in E Flat, Penguin scores 16.3/6, 1949


 

Une des conférences du merveilleux séminaire « Faits d’affects Â» que propose depuis quelque temps à l’Ehess-Cral Georges Didi Hubermann m’oblige à réévaluer la façon dont j’avais initialement compris ce rejet assez total3.
Même si j’ai pu regretter le traitement à mon goût trop expéditif que Didi Hubermann a pu faire dans le cadre de ce séminaire des émoticônes – peut-être dans une inattention plus générale au « fait graphique Â» assez contraire à ma compréhension de sa sensibilité habituelle –, ou la façon dont sa critique de l’alphabet n’a pas assez pris en compte, selon moi, le fait qu’elle s’exprimait grâce à ses articulations assez strictes, je ne saurai trop le remercier – peut-être à la suite de Catherine Guiral –, entre toute une galaxie de saveurs et de savoirs, d’avoir attiré mon attention sur les écrits du peu regretté Ernst Jünger.
 
Ernst Jünger fut un grand héros militaire allemand de la première guerre mondiale mais aussi un de ses écrivains les plus zélés et les plus lus, tout au moins dans l’Allemagne humiliée d’après 1918 en voie de solution finale. Son succès littéraire grandissant dans un pays en proie à la négation de la réalité des forments impérialistes du conflit en général, et de l’humiliation de la défaite et de ses suites en particulier, tient peut-être au retentissement de l’exacerbation du genre de « thèse de refoulement, de retournement » que développent ses livres. Partout dans ses écrits revient en effet l’idée que la guerre est le contexte, le sol, le terreau, de l’expérience véritable de la vie humaine. Et cette affirmation s’appuie sur une sorte d’effet de contraste. Dans le risque et l’expérience de la proximité, de l’imminence de la mort s’intensifierait le sentiment de la vie. En quelque sorte, avec Jünger comme avec tout un discours de plus en plus commun dans l’Allemagne de cette époque, la solution à la crise de la frustration germanique pourrait résider dans la célébration totale, totalisante, totalitaire, de la cause du drame et du trauma comme seul horizon du vrai, du pur, du bien, du sacré.
 
Dans une reprise oblique de la fameuse expression plus ou moins nietzschéenne de la « volonté de puissance » — qui fut en grande partie diffusée, systématisée et déformée par Elisabeth Nietzsche, la sÅ“ur aux amitiés nazies du philosophe –, Jünger défend lyriquement l’idée proprement maniaque d’un vérité humaine à la fois fondamentale et supérieure, résidant dans l’exercice de la « volonté Â», de la maîtrise, de la force et la grandeur confondues avec le pouvoir de prédation. Jünger répond en miroir déformant aux désastres et à l’avilissemnt de la guerre par la glorification de cette dernière : par une mystique paradoxale de la force virile, patriarcale, par une éthique forcenée de la domination, de la violence, de la cruauté ; par la mise à mort, l’éradication de l’altérité ; par la glorification voire la sacralisation du meurtre, du sang ; par une ontologie de « la volonté de tuer Â», de « la soif de sang Â»4 ; par la constitution d’une élite idéaliste garante de la pureté du sacrifice comme confortation du même ; par une esthétique mystique de l’épuration, de la hiérarchisation verticale, de l’élimination du grand, du petit autre.

« […] abyssale promesse de ces forces d’annihilation en tant que forces de procréation […] Â»
« C’est la guerre qui a fait des hommes et des temps ce qu’ils sont. Â»
« Le combat, père de toute chose, roue de la vie, notre père qui est aussi notre fils. Nous l’avons engendré comme il nous a faits nous. Â»
« […] La lutte pour l’existence dans toute sa nudité […] Â»
« […] La soif d’un déchaînement intégral dans la lutte […] Â»
« Lorsque le sang tournoyait dans les cerveaux, les veines, comme avant une nuit d’amour longuement désirée, et bien plus ardemment et follement encore, c’est lorsqu’on s’approchait toujours plus de l’énorme fracas qui mugissait là devant. Les impacts se bousculaient et roulaient en tonnerres toujours plus proches. Lorsqu’autour des pensées lâchées en meutes folles, les plaines brûlaient comme braises ardentes lorsqu’on était plus que émotion. Â»
« C’était le cours naturel des choses que cette redécouverte de la violence, ce culte viril exacerbé, entraînât une modification des rapports entre les sexes. S’y joignait une volonté plus âpre de saisir la vie à bras-le-corps, une jouissance plus fervente de l’être, dans la danse des éphémères sur gueule béante d’éternité. Â»
« La guerre est totale. Â»
Ernst Jünger, La guerre comme expérience intérieure, 19225

« Transformer cette impuissance de l’Allemagne en force originelle du peuple, soit une mobilisation supérieure accomplie par l’époque à travers nous. Â»
Ernst Jünger, Guerre et guerriers, 19306

« Il faut qu’advienne le visage d’une race nouvelle. Â»
Ernst Jünger, «  Sur la douleur Â», 19347

Kai Uwe Hemken, Ulrike Gärtner (commissaires), Jakob Gebert (scénographe), Kunsthalle Erfurt, 2009. Réalisation du projet de 1930 d’Alexander Dorner et László Moholy-Nagy, la Raum der Gegenwart, Salle des temps modernes, pour le Landesmuseum d’Hanovre

Kai Uwe Hemken, Ulrike Gärtner (commissaires), Jakob Gebert (scénographe), Kunsthalle Erfurt, 2009. Réalisation du projet de 1930 d’Alexander Dorner et László Moholy-Nagy, la Raum der Gegenwart, Salle des temps modernes, pour le Landesmuseum d’Hanovre


 

En quoi cet écrivain et penseur dispensable peut-il intéresser nos petites affaires de graphisme en général et éclairer la « conversion Â» ou le « reniement Â» de Tschichold en particulier ?
C’est que le discours de Jünger est un discours très esthétique qui ne cesse de reprendre un certain nombre de mots, d’expressions, de notions du mouvement artistique moderne révolutionnaire dont la Neue Typographie est l’un des constituants peut-être mineurs, du moins appliqué à l’économie, au cadre de vie, à |’industrie, au quotidien.
 
On peut d’abord repérer une notion centrale à cette pensée qui tient, comme on l’a vu, à la notion d’intensité. L’intensité est peut-être à l’époque un phénomène culturel central d’abord d’ordre scientifique ou technique. L’époque se construit avec ou après les réseaux énergétiques dialectiques et contradictoires des forces physiques d’Isaac Newton et Albert Einstein, des dynamiques naturelles de Charles Darwin, des classes sociales de Karl Marx, des poussées psychiques de Sigmund Freud. Le moment historique est en particulier à la fascination des puissances presque magiques de l’électricité qui déploie son réseau unificateur et transformateur de télécommunication, d’information et d’influence à distance, depuis le XIXe siècle, à partir de la forme du système polarisé de l’anode et de la cathode. Le mouvement – mais aussi la « mobilisation Â» – de la cité et de ses habitants paraît alors procéder d’une accélération énergétique créée par la différence, par l’opposition : comme une totalité « pure Â» à la fois du paradoxe et de l’antagonisme, comme une réunion dynamisante par les contraires. Et je ne peux m’empêcher de voir de curieux parallèles pouvoir se tramer soudain entre les mystiques esthétiques d’une vertu totalisante-totalitaire des renversements de Jünger – la mort pour la génération, la guerre comme amour, la volonté de tuer comme volupté, la mise à mort, l’épuration, la ségrégation comme éthique, la liberté de la volonté dans l’obéissance… – et, du côté du « premier Â» Tschichold, de tout un modèle souvent également exprimé de manière lyrique de la machine herméneutique plus ou moins ouverte ou efficace : de l’œuvre en tant, précisément, que tension.
 
Par exemple lorsque, en 1925, Jan Tschichold distingue de ses antécédents les principes de la Neue typographie par les critères de « contraste Â», de « dynamique Â» ou de « vivacité Â»8. Ailleurs, mais dans les mêmes périodes et les mêmes paysages en transformation, quand en 1930 Alexandre Dorner, pensant le musée comme un électrifiant kraftwerk « centrale électrique Â»9, met en place la Raum der Gegenwart « Salle des temps modernes Â», avec en son centre la sculpture-machine cinétique évidemment électrique Licht-Raum-Modulator de László Moholy-Nagy, permise par le soutien de l’« entreprise d’électricité générale Â» allemande AEG pour laquelle Peter Behrens inventait au début du XXe l’identité visuelle d’entreprise10. Plus tard, mais dans la même perspective, avec le schéma du corréalisme de Frederick Kiesler de 1949 dans lequel objet et sujet sont l’anode et la cathode d’une dynamique dialectique générale de la perception.

« Transformer cette impuissance de l’Allemagne en force originelle du peuple, soit une mobilisation supérieure accomplie par l’époque à travers nous. Â»
Ernst Jünger, Guerre et guerriers, 193011

« […] les maîtres-mots étaient clarté, concision, précision ; plus d’articulation, de contraste, de tension entre la couleur et les valeurs de noir et de blanc de la page typographique. Â»
Herbert Bayer, « Sur la typographie Â», 196712

On peut ensuite s’étonner de certains parallèles qui se dessinent entre les célébrations extatiques de Jünger et, non seulement les thèses – elles-même assez lyriques – de certaines avant-gardes modernes dont on sait qu’elles se commirent effectivement – je veux parler de l’énigme des futuristes-fascistes italiens –, mais aussi avec certaines positions de Tschichold soi-même. Ainsi quand la fascination des puissances fonctionnelles productivistes « supra-individuelles Â» de la machine peut être associée à l’élan vital dans les deux « camps Â» constructivistes et nationalistes.

« L’ingénieur façonne notre époque. Les caractéristiques de ses ouvrages sont : l’économie, la précision, la mise en Å“uvre de pures formes constructives conformes à la fonction de l’objet. […] Notre vie est incroyablement enrichie par ces nouveautés techniques que nous croisons à chaque pas. […] L’aspiration à la pureté de la forme est donc le dénominateur commun de tous les efforts dédiés à la reconstruction de notre vie et de nos formes d’expression. Par-delà leur diversité, ils reconnaissent leur objectif commun : unité de la vie ! Â»
« La Nouvelle Typographie diffère de la précédente parce qu’elle est la première à atteindre la dérivation des apparences du texte de ses fonctionnements. Â»
« Les caractéristiques personnelles et ‹ la griffe de l’artiste â€º sont contraires à notre propos. Seul l’anonymat des formes élémentaires et l’emploi de principes supra-personnels, associés à l’abandon de la vanité individuelle (jusqu’à aujourd’hui faussement appelée ‹ personnalité â€º) au profit d’une pure conception, garantiront l’émergence d’une culture commune, collective, pénétrant toutes les manifestations de la vie – y compris dans le domaine de la typographie. Â»
Jan Tschichold, 192513

« Tout est monotone, uniforme et gris. Tout est objectif et fonctionnel, comme la marche d’une machine en mouvement, mais tout est également enivrant, comme la vue d’une machine peut-être enivrante pour celui qui aime la vie dans sa plénitude et sa violence. Â»
Ernst Jünger, Feu et sang, 192514

« Nous voulons glorifier la guerre – seule hygiène du monde –, le militarisme, le patriotisme, le geste destructeur des anarchistes, les belles idées qui tuent, et le mépris de la femme. Â» plus loin « nous les jeunes, les forts et les vivants futuristes ! Â»
Filippo Tommaso Marinetti, Manifeste de fondation du Futurisme, 190915

On devra aussi relever certains accents racistes de la pensée de Tschichold, quoique d’un racisme intégré à la pensée bien générale de son temps, comme le montre sa citation d’un autre penseur de la modernité début de – XXe – siècle : Adolf Loos, et de son texte majeur de 1908 Ornament und Verbrechen, traduit par Marcel Ray Ornement et crime, en 1913, pour Les cahiers d’Aujourd’hui16 .

« Plus un peuple est primitif, plus il est prodigue d’ornements et de décorations. L’Indien surcharge d’ornements chaque objet, chaque bateau, chaque pagaie, chaque flèche. Tenir à la décoration, c’est se placer au niveau de l’Indien. Or l’Indien en nous doit être dépassé. Â»
Adolf Loos, cité par Jan Tschichold, 192517

On pourra aussi noter l’inquiétante concomitance d’un certain rapport à l’élémentaire, au concentré d’essence de pureté qui définit un concept de ralliement du mouvement moderne pour beaucoup abstrait-concret, mais aussi certains mots d’ordres fascisants d’un Jünger étrangement « travailliste Â» – quoique du côté de l’activité des guerriers.

« […] un nouveau rapport à l’élémentaire, à la liberté et à la puissance […] Â»
« […] cette forme pure de la guerre qui puisse ressembler aux formes les plus élémentaires du cosmos […] Â»
Ernst Jünger, Le travailleur, 193218

« L’essence de la Nouvelle Typographie est la clarté. Â»
« Il s’agit de donner au contenu de ce qui est imprimé une expression pure et directe. Â»
« L’aspiration à la pureté de la forme est donc le dénominateur commun de tous les efforts dédiés à la reconstruction de notre vie et de nos formes d’expression. Par-delà leur diversité, ils reconnaissent leur objectif commun : unité de la vie ! Â»
Jan Tschichold, La nouvelle typographie, 1925 19

« Nous appelons typographie élémentaire une typographie entièrement développée à partir de ses propres données. Cela a pour but de traiter l’énoncé-image [satzbild] dans un certain sens de sorte qu’il devienne un texte-organisme dépouillé de tout filet et de tout ajout décoratif. Nous appelons cette approche la ‹ typographie fonctionnelle â€º ou ‹ organique â€º. Â»
Max Bill, 194620

Ainsi d’un certain rapport commun à l’exigence machinique, industrielle, du type, du format, de la norme plus ou moins partagée, plus ou moins imposée, lié chez Jünger à une inquiétante lecture politique de la Gestaltpsychologie et à la façon de cette dernière de valoriser – en tout cas au sein du procès de la perception humaine – le tout vis-à-vis de ses parties.

« Comme le Travailleur possède en tant que type une qualité qui relève de la race, on peut attendre de lui cette univocité de la vision qui compte parmi les caractéristiques de la race et constitue le présupposé de tout jugement de valeur sûr – au contraire d’un esprit de jouissance qui se complaît à une vue kaléidoscopique des cultures. Â»
Ernst Jünger, Le travailleur, 193221

« Aspirant à satisfaire les nouveaux besoins de notre époque et à produire des imprimés atteignant une perfection maximale dans l’esprit du temps présent, la Nouvelle Typographie s’est d’emblée intéressée au plus haut point à toutes les démarches de normalisation et les a toujours soutenues. Â»
Jan Tschichold, La nouvelle typographie, 192522

Enfin il y a cette fascination technique proche, cette esthétisation partagée, morale parce qu’objective du nouvel outil « révolutionnaire Â» de la photographie. « Impitoyable Â» et « insensible Â» du côté de Jünger, « incorruptible Â» et « objecti[ve] Â» du côté de Tschichold.

« Nous indiquions déjà dans le travailleur que la photographie était une arme dont le Type [la nouvelle race d’hommes] se servait. La vision est un acte offensif. Â»
« La guerre mondiale a été le premier grand événement à être enregistré ainsi et il n’y a pas depuis de fait important qui n’ait été saisi par l’œil artificiel. Les efforts tendent également à percevoir des domaines qui restent fermés à l’œil humain. L’œil artificiel traverse les bancs de brouillard, la vapeur atmosphérique, l’obscurité et jusqu’à la résistance de la matière elle-même. Les cellules optiques travaillent dans la profondeur des abysses et à la haute altitude des ballons sondes. La photo se situe donc en dehors de la zone de sensibilité. Elle présente un caractère télescopique. On remarque que l’événement est vu par un Å“il insensible et invulnérable. Â»
Ernst Jünger, « Sur la douleur Â», 193423

« Le véritable charme de la photographie réside précisément dans sa grande clarté, souvent surréel, et dans son incorruptibilité. Â»
« L’objet présenté doit l’être de la façon la plus claire, la plus univoque et la plus fidèle possible. Rien ne satisfait cette exigence mieux que la photographie. Â»
Jan Tschichold, La nouvelle typographie, 192524

On n’a pas encore parlé d’un commun attrait pour un certain esprit de violence. Sans aller jusqu’aux fascinations de Jünger pour les « orages d’acier Â» de la guerre industrielle25, l’efficacité de propagande d’un Simon Eisenstein, positivement soutenue par toute une « esthétique de l’École de Francfort Â», se fonde pour beaucoup sur les puissances dialectiques « choquantes Â» des violences du cut-montage cinématographique peut-être au fondement de toutes une esthétique moderne étendue du montage, du collage ouvert des différences.

« Par son mécanisme même, le film a rendu leur caractère physique aux traumatismes moraux pratiqués par le dadaïsme. Â»
Walter Benjamin, 193626

Il faudra sans doute également nuancer ici la violence ou l’intensité du rejet des nouvelles expressions typographiques d’avant-guerre auquel se livre Jan Tschichold dans la force de l’âge. À l’issue d’un conflit notamment marqué par l’industrialisation du crime de masse vient la possibilité d’un moment rétrospectif de bilan et de réflexivité. L’heure est au questionnement – non sans tensions – des conditions de sociétés et de relations plus justes, au moins pacifiques, et cela peut concerner les domaines mineurs du graphisme, de la typographie.
Jan tschichold reprend, au sortir de la guerre, une forme qui s’éloigne sensiblement des effacements objectifs d’une modernité fonctionnaliste universaliste très suisse. Il reprend aux côtés des néo-traditionalistes anglais le vocabulaire historiciste aristocratique et ses effets de centrement et de hiérarchies sensibles, son tropisme corporel et artisanal. Mais il le mêle sourdement d’un sens de la structure et, précisément, d’une intensité, très définitoires du constructivisme d’Europe Centrale qui le fit se renommer un temps Ivan.
On peut peut-être considérer que le rejet assez politique de Tschichold est alors plutôt celui de la violence du rejet. Cette absolue rupture, cette négation frontale qui définit le mouvement moderne de table rase vis-à-vis d’un passé d’éternel retour d’une antiquité rêvée – à chaque fois reformulée. La remise en cause des anciennes nouvelles orientations de l’elementare typographie finissait, après l’abîme de la guerre, dans un savant syncrétisme qui n’oubliait pas les nouveaux acquis et semblait globalement leur préférer, notamment dans le cas du livre de transitivité – synonyme assez strict de « tradition Â» –, les formes de l’ancien régime d’abord jugés dangereusement hiérarchiques.

« […] pour la conception d’imprimés classiques, comme les livres, avant tout les Å“uvres littéraires, [‹ la nouvelle typographie â€º] est inappropriée et à bannir. Â»
Jan Tschichold, 194627

« En typographie, respecter les règles de composition qui ont mis des siècles à s’établir n’est pas plus historisant et éclectique que de s’appuyer sur d’anciens brevets d’ingénieurs dans l’industrie. Â»
« Les caractères typographiques les plus lisibles, c’est-à-dire les meilleurs qui soient à notre disposition, sont les caractères classiques (par exemple les Bembo, Garamond, Erhardt, Van Dyck, Caslon, Bell, Baskerville, Walbaum) et, parmi les nouveaux, ceux qui ne s’en distinguent qu’à peine (Perpetua, Lutetia, Romulus et quelques autres). Nous devons avant tout aux vingt-cinq ans passés par Stanley Morison chez un fabricant anglais de machines à composer, le grand nombre de fontes appartenant aux deux ensembles. La renaissance des écritures classiques a eu pour conséquence un renouvellement typographique dans le monde entier, lequel est au moins aussi important que l’était le processus de purification de la Nouvelle Typographie pour l’Allemagne. Â»
« Ce qui était symétrique était rattaché [à l’époque de la Neue Typographie] de manière irréfléchie et inconsidérée aux formes d’expression de l’absolutisme politique et alors déclaré comme caduc. Â»
Jan Tschichold, 194628

« Le sentiment aujourd’hui est que l’idéal de la composition ne réside ni dans la symétrie, ni dans l’asymétrie. Le typographe se positionnera dans l’une ou l’autre de ces voies selon son mandat. Â»
Jan Tschichold, 194629

Machine à écrire transportable Olympia Robust WW2, Büromaschinenwerke AG, avec le glyphe SS, 1939-44

Machine à écrire transportable Olympia Robust WW2, Büromaschinenwerke AG, avec le glyphe SS, 1939-44


 

Mais bien entendu, nous ne pourrons en rester là. Pour finir, il nous faudra, dans cette réévaluation critique de la « conversion de Jan Tschichold Â» en forme d’abandon relatif des formes et des idéaux du mouvement moderne, opérer une distinction claire dans cette étrange concomitance des préoccupations fascistes et des discours du mouvement moderne progressiste du début du siècle dernier. Dans ce qui relève peut-être d’un effet d’un zeitgeist, d’un « esprit du temps Â» d’alors dont on connaît peut-être d’étranges échos aujourd’hui, ou précisément dans les tensions exacerbées entre des postions politiques de plus en plus intensément opposées, nous tenons à affirmer qu’il y a bien une différence éthique décisive.

Le paradoxe cultivé par Jünger est celui d’une affirmation formée-fermée : celui d’une injonction, d’un ordre, d’une propagande rhétorique. Il s’agit d’une stratégie de communication publicitaire, une technique de langage fonctionnaliste très esthétique – et dans ce sens, qui concerne au moins certains enjeux du « design graphique Â». Une instrumentalisation visuelle qui peut apparaître opportuniste, comme lorsque les nationaux-socialistes récupérent un certain nombre de valeurs et de symboles esthétiques révolutionnaires « progressistes Â» : la couleur rouge du drapeau, la figure « type Â» du travailleur – même s’il est « travailleur de la guerre Â» –, le dynamisme des tensions, la réduction à l’essence abstraite, la photographie… Il s’agit d’un discours de persuasion et d’influence fondé sur la rhétorique de l’oxymore ou d’une forme d’antilogie qui se mêle de l’absolu du paradoxe du mystère religieux. L’idée de se conformer aux voies impénétrables, supérieures, qui, au moins dans nos religions du Livre, réclament depuis longtemps le sacrifice, le meurtre et la soumission à la volonté autoritaire d’un chef, d’un père assez auto-désigné : l’asservissement généralisé et total à l’arbitraire d’une injonction définitive.

« La typographie est un outil de communication. Elle doit produire une communication claire dans sa forme la plus intense [eindringlichsten]. Â»
László Moholy-Nagy, 192330

« Nationaux-socialistes, nous voyions dans notre drapeau notre programme. Dans le rouge, nous voyions l’idée sociale du mouvement ; dans le blanc, l’idée nationaliste ; dans la croix gammée, la mission de la lutte pour le triomphe de l’Aryen et aussi pour le triomphe de l’idée du travail productif, idée qui fut et restera éternellement antisémite. Â»
Adolf Hitler, 192531

« Ã€ l’esthétisation de la vie politique résultant de la technique et de la montée du fascisme, le communisme doit répondre par la politisation de l’art. Â»
Walter Benjamin, 193932

La tension promue par le mouvement moderne – celle du « premier Â» Tschichold – est le produit d’un semblable mot d’ordre de clarté et de structure fonctionnelle mais qui se réalise au contraire par l’ouverture du choc, du collage, du montage, du décentrement : par une violence peut-être comparable mais qui ne parvient pourtant pas à une résolution formelle : qui ne s’achève pas. Du moins, qui laisse à l’objet graphique une relative autonomie de relation sensible ou esthétique vis-à-vis de son texte, sinon de promotion, au moins de transitivité.
 
Il y a dans les formes dadaïsto-constructivistes qui frappent le jeune Tschichold à l’exposition du Bauhaus de Weimar d’août 1923 une dynamique ouverte qui est celle de la « grande cité Â» industrielle33. Il y a dans ces propositions visuelles, graphiques, typographiques, une complexité, un non achèvement, une autonomie de l’œuvre qui réévalue la place du spectateur et de l’altérité au lieu d’assigner un sentier lumineux tout fait de la grandeur de la servilité et de la violence de la soumission au même.
 
Ainsi, par exemple, chez l’ancien « neue Â» Tschichold, la puissance fascinante de « l’élecromécanisation Â» industrielle est-elle taxée d’« absurde comme fin en soi Â». Mais est, au contraire, défendue comme le moyen efficace de la « liberté expressive Â», de la « puissance visuelle inconnue Â»34. Ainsi, évidemment, « Ivan Â» Tschichold défend-il contre tout « nationalismus Â» une idée « supra- ou inter- nationaliste Â» très imprégnée de marxisme plus ou moins bolchévique35. Et l’on peut ici aussi comprendre la volonté d’anonymat technique moderne comme une forme de résistance à la violence de l’autorité hiérarchique nazie. On peut relire le goût de la photographie documentaire comme une façon de convoquer la brutalité d’un matériau autonome, étrange, de plus – avec la typographie, avec le dessin, la peinture plus ou moins corporels, avec le travail plus ou moins musical de la lumière – dans le dialogue ouvert des matières exogènes du visuel.
 
Il y a donc du côté nazi-onal soi-disant socialiste une volonté de retourner et de célébrer pour cacher la réalité de l’époque : l’humiliation de la défaite militaire mais aussi l’état de souffrance et de déliquescence du corps social allemand avec le chômage, l’inflation, les réparations imposées par le traité de Versailles. Il y a du côté du mouvement moderne, la tension d’une machine herméneutique qui peut réévaluer la place du spectateur et promettre l’avènement d’une réalité construite au travers de l’expérience des formes graphiques. Il y a une dynamique de retour à un « vrai Â» a priori défini arbitrairement par les possédants : les glorieux aryens, le terreau lumineux de la germanité. Il y a une tension prospective offerte à n’importe quel « regardeur Â» vers des lendemains de construction qui peuvent éventuellement chanter, vers l’événement, l’imprévu.

Jan Tschichold, affiche, Simon Eisenstein, Iwan des Scherckliche – Ivan le terrible –, Phoebus Palast, 1927, Jan Tschichold, Die Neue typographie, op. cit., p. 185

Jan Tschichold, affiche, Simon Eisenstein, Iwan des Scherckliche – Ivan le terrible –, Phoebus Palast, 1927, Jan Tschichold, Die Neue typographie, op. cit., p. 185


 

Georges didi Huberman souligne à maintes reprises ce différend fondamental des lectures des puissances fascinantes de l’action au temps de la machine industrielle énergétique, de ses dynamiques prometteuses ou subjuguantes. C’est ainsi, en retournant avec Gilles Deleuze via Baruch Spinoza à la question nietzschéenne de la volonté de puissance qu’il met le doigt, à mon avis, sur une distinction des plus éclairantes36. La puissance n’est pas le pouvoir. Notre capacité à « agir Â» le monde – par exemple notre wirkraum « monde ou espace actanciel Â» dans le vocabulaire éthologique d’un Jakob von Uexküll37 du reste lui-même sensible aux thèses nationalistes et racistes de nombre de ses compatriotes de l’époque – n’est pas forcément instrumentalisée dans sa domination, dans sa soumission, et finalement – comme on peut le craindre en partie aujourd’hui – dans sa destruction.

« Possest, c’est fait de deux termes en latin :   qui est l’infinitif du verbe pouvoir, et est qui est la troisième personne du verbe être à l’indicatif présent, il est. Posse et est, il contamine les deux et ça donne possest. Et qu’est ce que c’est le possest ? Le possest c’est précisément l’identité de la puissance et de l’acte par quoi je définis quelque chose. Donc je ne définirais pas quelque chose par son essence, ce qu’elle est, je la définirais par cette définition barbare, son possest : ce qu’elle peut. À la lettre : ce qu’elle peut en acte. Â»
« […] les choses ont plus ou moins d’intensité ; ce serait ça l’intensité de la chose qui serait, qui remplacerait son essence, qui définirait la chose en elle-même, ce serait son intensité. Â»
« […] la question c’est comment on essaie de se débrouiller dans ce monde de puissances. […] On en est encore à évaluer en quoi ce peut être important de tenir un discours sur la puissance, une fois dit que les contresens, que de toutes manières on est en train d’éviter, c’est comprendre ça comme si Spinoza nous disait, et Nietzsche après, ce que les choses veulent c’est la puissance. Évidemment s’il y a quelque chose que la formule ‹ la puissance est l’essence même â€º ne veut pas dire, on pourrait traduire ça par ‹ ce que chacun veut c’est le pouvoir â€º. On voit ce que Spinoza nous dit, ou Nietzsche après, ce que les choses veulent, c’est la puissance. Non, ‹ ce que chacun veut c’est le pouvoir â€º, c’est une formule qui n’a rien à voir. Premièrement, c’est une banalité, deuxièmement, c’est une chose évidemment fausse, troisièmement, ce n’est sûrement pas ce que veut dire Spinoza. Ce n’est pas ce que veut dire Spinoza parce que c’est bête et que Spinoza ne peut pas dire des choses idiotes. Ce n’est pas : ha, tout le monde, des pierres aux hommes, en passant par les animaux, ils veulent de plus en plus de puissance, ils veulent du pouvoir. Non ce n’est pas ça ! On le sait que ce n’est pas ça puisque ça ne veut pas dire que la puissance soit l’objet de la volonté. Non. Donc on sait ça au moins, c’est consolant. Â»
Gilles Deleuze38

Signature de « Ivan Â» Tschichold, page liminaire de Colin Ross, Das Fahrten und Abenteuerbuch, Büchergilde Gutenberg, Leipzig, 1925

Signature de « Ivan Â» Tschichold, page liminaire de Colin Ross, Das Fahrten und Abenteuerbuch, Büchergilde Gutenberg, Leipzig, 1925


 

Pour finir ici avec cette esquisse évidemment trop rapide et partielle, je voudrais revenir sur le mot d’un Robert Musil peu suspect d’amitiés nazies, à nouveau rapporté par Georges didi Huberman, cette fois à propos du symbole-même de la pulsion maléfique voire diabolique de mort « moderne Â» que dit rejeter Jan Tschichold dans sa maturité peut-être éclairée d’après-guerre39. Je veux parler d’Adolf Hitler soi-même et de sa qualification par Musil, en mars 1933, dans son carnet, d’« affect parlant Â» capable « d’exciter une volonté privée de but Â»40. « Exciter une volonté privée de but Â», voilà une assertion peut-être à nouveau frappante dans sa possible proximité avec la définition Kantienne de la Beauté qui peut résonner au cÅ“ur de plus d’une approche dialectique et libertaire de l’art – et par exemple, dans mon approche sans doute contestable et marquée par les thèses de l’École de Francfort. Emmanuel Kant définit en effet la Beauté comme l’expression d’un jugement de goût capable de n’être marqué ni par le concept, ni par l’intérêt, ni par la finalité, mais qui demeure pourtant mystérieusement partageable comme l’effet d’un pari.

« Â§2 La satisfaction qui détermine le jugement de goût est totalement désintéressée Â»
« Â§6 Le beau est ce qui est représenté, sans concept, comme objet d’une satisfaction universelle Â»
Emmanuel Kant, 179041

J’espère que le rapprochement très intempestif de ces propositions apparemment comparables et incomparables accuse leur différence essentielle de manière éclatante. Contre la fermeture, la résolution – peut-être par fascination, par excitation, par tradition, par peur ou par paresse – à une pulsion de mort, de soumission à la domination, à l’autorité du possédant auto-proclamé souvent par la force. Contre la fin fasciste et nazie, se dessine au contraire dans le mouvement de la neue typographie codifié par le jeune Jan Tschichold – et peut-être encore dans ses suites de syncrétisme et de raffinement historiciste – l’ouverture d’un possible sans précédent mais pourtant authentiquement humain. Peut-être pas une pulsion d’amour, mais au moins une pulsion d’émoi : le sentiment d’une extériorité, la possibilité d’un ailleurs, la place de l’autre, une intensité.
 
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  1. Jan Tschichold, « Glaube und Wirklichkeit Â» – Mythe et réalité –, Schweizer Graphische Mitteilungen, no 6, 1946, traduit par Victor Guégan in Max Bill/ Jan Tschichold. La querelle typographique des modernes, B 42, Paris, 2014 [2012], p. 102 []
  2. Fernand Baudin, « Jan Tschichold : un maître typographe Â», Communication & Langages, no 25, 1975, p. 48 []
  3. Georges Didi Hubermann, « La guerre à l’intérieur Â», Faits D’affect, 30 janvier 2023, CRAL – Centre de Recherches sur les arts et le langage, https://www.youtube.com/watch?v=xC2D0W-ipO4 []
  4. Ernst Jünger, Der kämpf als inneres Erlebnis – La guerre comme expérience intérieure –, E.S. Mittler & Sohn, Berlin, 1922. Les citations d’Ernst Jünger sont globalement reprises aux traductions de Georges Didi Hubermann, « La guerre à l’intérieur Â», Faits D’affect, op. cit., c’est pourquoi les pages ne seront pas précisées dans les notes de ce texte. []
  5. Ernst Jünger, Der kämpf als inneres Erlebnis – La guerre comme expérience intérieure –, op. cit. []
  6. Ernst Jünger, Krieg und Krieger – Guerre et guerriers –, Junker und Dünnhaupt, Berlin, 1930 []
  7. Ernst Jünger, « Sur la douleur Â», Blätter und Steine – Feuilles et Pierres –, Hanseatische Verlagsanstal, Hambourg, 1934 []
  8. Jan Tschichold, Die Neue typographie. Ein handbuch fur zeitgemass schaffende, Verlag Des Bildungsverbandes Der Deutschen Buchdrucker, Berlin, 1928. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, traduit de l’allemand par Françoise et Philippe Buschinger, Éditions Entremonde, Genève, Paris, 2016 [1925], respectivement p. 101, 104 et 106 []
  9. Du reste en relation avec le travail d’Herbert Bayer et une vision très émancipée et valorisée du design. Cf. Cyril Crignon (trad.), Alexander Dorner, Le dépassement de l’« art Â», Presses universitaires de Paris Nanterre, Paris, 2022 (1947), p. 211 []
  10. Siegfried Giedion, ‘Der deutsche Werkbund in Paris’, Der Cicerone, Halbmonatsschrift für die Interessen des Kunstforschers & Sammlers, 22, no 15/16, 1930, p. 429–34 []
  11. Ernst Jünger, Krieg und Krieger – Guerre et guerriers –, op. cit. []
  12. Herbert Bayer, « Sur la typographie Â», Design and Typography, Otto Maier Verlag, 1967, trad. Stéphane Darricau, in Helen Armstrong (ed.), Le graphisme en textes, Pyramid, Paris, 2011, p. 44 []
  13. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, op. cit., respectivement p. 43-45, 100 et 45 []
  14. Ernst Jünger, Feuer and Blut – Feu et sang –, Stahlhelm-Verlag, Magdebourg, 1925 []
  15. Filippo Tommaso Marinetti, « Manifeste de fondation du Futurisme Â», Le Figaro, 20 février 1909 []
  16. Adolf Loos, « Ornement et crime Â» traduction de Marcel Ray, Les cahiers d’aujourd’hui 5, 1913, p. 252 []
  17. Adolf Loos, cité par Jan Tschichold, La nouvelle typographie, op. cit., p. 103 []
  18. Ernst Jünger, Der Arbeiter. Herrschaft und Gestalt – Le travailleur –, Hanseatische Verlagsanstalt, Hambourg, 1932 []
  19. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, op. cit., p. 99, 100, 45 []
  20. Max Bill, « Über typographie », tiré à part, Schweizer Graphische Mitteilungen, no 4, 1946 []
  21. Ernst Jünger, Der Arbeiter. Herrschaft und Gestalt – Le travailleur –, op. cit. []
  22. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, op. cit., p. 131 []
  23. Ernst Jünger, « Sur la douleur Â», op. cit. []
  24. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, op. cit., p. 122, 195 []
  25. Ernst Jünger, In Stahlgewittern – Orages d’acier –, édition à compte d’auteur, Leisnig, 1920 []
  26. Walter Benjamin, Das Kunstwerk im Zeitalter seiner technischen Reproduzierbarkeit, « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproduction mécanisée Â», Écrits français, Gallimard, Paris, 1991 (1936), p. 389 []
  27. Jan Tschichold, conférence « Constantes de la typographie Â», Association des graphistes suisses, Zurich, 1945, rapporté rageusement par Max Bill, « De la typographie Â», Schweizer Grafische Mitteilungen, no 4, 1946, p. 193-200 []
  28. Jan Tschichold, « Glaube und Wirklichkeit » – Mythe et réalité –, Schweizer Graphische Mitteilungen, no 6, 1946, traduit par Victor Guégan in Max Bill/ Jan Tschichold. La querelle typographique des modernes, B 42, Paris, 2014, p. 102, 106, 97 []
  29. Jan Tschichold, lettre à Rudolf Hostetler, rédacteur en chef du Typographische Monatblätter, du 31 janvier 1946, rapporté par Richard B. Doubleday, « Résurgence of Classical Design », in Cees W. de Jong (éd.), Jan Tschichold, Thames & Hudson, Londres, 2008, p. 266 []
  30. László Moholy-Nagy, traduction de l’auteur, « Die Neue Typographie Â», Staatliches Bauhaus in Weimar, 1919-23, Bauhaus Verlag, Weimar-Munich, 1923, p. 141 []
  31. Adolf Hitler, Mein Kampf, verlag Franz Eher Nachfloger, Munich, 1925-1926, traduction française par Jean Gaudefroy-Demonbynes et Augustin Calmettes, Mon Combat, les Nouvelles Éditions latines, Paris, 1934 []
  32. Walter Benjamin, « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique Â», dernière version 1939, in Å’uvres III, Paris, Gallimard, 2000, p. 316 []
  33. Moholy-Nagy Nagy, «Dynamic Des Gross-Stadt», Ma, 1924, Malerei Photographie Film Bauhuasbuch n°8, Munich, 1925 []
  34. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, op. cit., p. 86, 88 []
  35. Jan Tschichold, La nouvelle typographie, op. cit., p. 109 []
  36. Georges Didi-Huberman, « La guerre à l’intérieur (suite) Â», Faits d’affects 2.7, 7.02.2023, https://www.youtube.com/watch?v=pDRu5j8PNF0 []
  37. Jakob von Uexküll, Georges Kriszat, Streifzüge durch die Umwelten von Tieren und Menschen : Ein Bilderhuch unsichtharer Welten, Springer, Berlin, 1934. Traduction française par Charles-Martin Freville : Milieu animal et milieu humain, Payot & Rivage, Paris, 2010 []
  38. Gilles Deleuze, « Sur Spinoza Â», Cours Vincennes : la puissance, le droit naturel classique, Cours du 09/12/1980, https://www.webdeleuze.com/textes/9 []
  39. Georges didi Huberman, « Documents-sentiments (faits de guerre et d’affects) Â», Faits d’affects. 2 – 8, https://www.youtube.com/watch?v=bdLvWmYSh30 []
  40. Ici encore, la traduction est de Georges didi Huberman. []
  41. Alain Renault (dir., trad.), Emmanuel Kant, Critique de la faculté de juger, Flammarion, Paris, 2015 (1790), p. 182, 189 []

Entrevue

Beauregard